L'art à l'état vif a paru pour la première fois chez Minuit en 1991, proposant une nouvelle théorie esthétique pragmatique, où s'affirmait paradoxalement et avec force, aux côtés d'un poème de T S Eliot, des formes de l'art populaire, comme le rap, le graph ou le funk. Le livre fit grand bruit et permit de faire se rencontrer des esthétiques qu'on aurait pu croire étrangères, qui se retrouvaient en fait dans la pratique artistique. Le corps prenait également une place centrale dans ce livre de Shusterman, annonçant ce qui allait devenir le thème de son oeuvre à venir : la somaesthétique, qu'il a développée ensuite dans plusieurs ouvrages dont Conscience du corps (L'éclat, 2007). 25 ans plus tard, le livre reparaît en poche, enrichi d'une nouvelle préface qui fait état du chemin parcouru.
L'esthétique pragmatiste se distingue de la tradition philosophique en ce qu'elle ne cherche pas à séparer l'art de ce qui n'en est pas. Elle conçoit nos expériences esthétiques dans la continuité de celles qu'occasionnent nos diverses pratiques de vie, publiques comme privées.
Comment penser cette continuité? C'est l'enjeu principal de ce livre, qui examine la question sous deux aspects. Les premiers chapitres retissent les liens qui nous permettent de comprendre comment nos concepts esthétiques les plus spécifi ques, ceux que nous utilisons pour juger et apprécier l'art le plus consacré (aura, authenticité), sont solidaires d'expériences que peuvent nous faire vivre aussi, à leur manière, les arts dits populaires (techno, comédies musicales country, hip-hop), généralement négligés par la philosophie.
La seconde partie explique comment nos capacités esthétiques, éthiques et critiques sont profondément déterminées par notre expérience corporelle - autofaçonnement quotidien, pratiques sportives, coutumes, et tout ce que l'on peut verser du côté d'un «souci de soi» ou style somatique : c'est ce que Richard Shusterman, cherchant à développer une nouvelle voie pragmatiste, nomme somaesthétique.
Ce nouveau livre de Richard Shusterman constitue la première exposition systématique de la «soma-esthétique», nouvelle discipline que l'auteur a commencé à développer depuis une dizaine d'années environ. Mais il ne s'agit pas seulement de défendre une philosophie du corps contre une tradition philosophique occidentale qui a pour l'essentiel rejeté et dénigré ce dernier. Il s'agit au contraire de se loger dans le coeur même de ces philosophies qui, au XXe siècle, ont accordé au corps une place centrale, afin d'en scruter les limites et de définir des stratégies nouvelles pour penser et vivre le corps.
Richard Shusterman s'intéresse à l'usage du vocabulaire religieux, chrétien, dans l'influente philosophie de l'art d'Arthur Danto, en particulier le terme « transfiguration », emblématique de son oeuvre depuis le désormais célèbre La transfiguration du banal paru en français en 1989 (Le Seuil). Richard Shusterman montre ainsi comment la religion continue parfois à hanter la théorie esthétique contemporaine, même lorsqu'elle est pensée par des auteurs laïcs, et éclaire lamanière dont la pensée sur l'oeuvre d'art conditionne notre réception des oeuvres, tout en interrogeant les modalités de leur interprétation.
En s'appuyant sur l'ambitieuse réflexion qu'il a lui-même développée au sujet des relations entre l'art et la religion, ainsi qu'entre l'art et la vie (notamment avec L'art à l'état vif, la pensée pragmatiste et l'esthétique populaire) Richard Shusterman revient sur les limites qui séparent un objet ordinaire d'une oeuvre d'art, question qui est au coeur de la réflexion d'Arthur Danto dans La transfiguration du banal.
Richard Shusterman se sert de sa propre expérience du bouddhisme zen pour développer une conception immanente de l'art qui constitue une alternative pragmatiste et hédoniste à l'approche analytique idéaliste hégélienne imprégnée de transcendantalisme d'Arthur Danto proposant de ne pas isoler les oeuvres dans un monde « surnaturel » qui se situerait au-dessus de l'expérience quotidienne de la vie.
A travers toutes ces questions, ce recueil traite non seulement du sens de l'art, mais aussi du sens de l'art dans nos vies.
Une réponse d'Arthur Danto rend compte du dialogue qui s'est noué, au-delà de leurs divergences de vues, entre ces deux grands représentants contemporains de la philosophie de l'art aux Etats-Unis.
Quelles raisons peut-on avoir de s'engager dans la pratique de la philosophie ? Ceux qui y sont déjà engagés n'échappent évidemment pas à cette question.
La nature critique et réflexive de la philosophie l'exige. Que signifie : être philosophe ? Ne suffit-il pas d'étudier la philosophie, d'écrire sur elle ou de l'enseigner, où que ce soit ? Que demande-t-elle de plus ? Une façon particulière de vivre ? Une vie d'une certaine beauté ? Se demander comment vivre la philosophie relève-t-il aussi de l'esthétique ? C'est à ces questions que le présent livre voudrait s'attaquer, bien que son auteur n'ignore pas l'ampleur de la tâche.
Ce conte philosophique revisite les temps forts de performances gestuelles, sensorielles et photographiques vécues par le corps pensant et sensible de l'Homme en Or. L'homme en Or est l'authentique avatar de Richard Shusterman lui-même, praticien réfléchissant en filigrane sur sa propre transformation et sur l'expérience qui en découle. En ressort l'expression d'une conscience incarnée et le récit d'une pensée ancrée dans le corps, comme en témoigne le philosophe, principal narrateur et acteur du récit. (Sylvie Mokhtari, revue Critique d'art)
Édition bilingue anglais/françaisRévélés au lectorat français par Pierre Bourdieu, les travaux de Richard Shusterman comptent parmi les plus importants de l'époque contemporaine. Convaincu par les capacités cognitives du corps, Shusterman invite à repenser l'expérience esthétique pour sortir d'une « conception muséale de l'art ». Pour ce faire, le philosophe américain a développé une philosophie singulière, la « somaesthétique », qu'il définit comme une étude méliorative et critique de notre expérience et de notre usage du corps vivant. Sa philosophie est donc à la fois théorique et pratique, un geste et une pensée, comme l'atteste le présent livre, issu d'une collaboration avec l'artiste Yann Toma.L'Homme en Or, c'est d'abord une performance artistique et philosophique. Le récit fictif de ses aventures compose un petit conte philosophique qui illustre la somaesthétique.