Justice et médias forment un couple indissociable, aux rapports par essence tumultueux.
De la révélation d'une " affaire ", au déroulement de l'enquête, de l'instruction puis du procès, deux logiques s'entrechoquent : celle du temps médiatique qui n'est pas celui, souvent long, de la procédure. Comment alors concilier le droit à l'information et le respect du secret de l'instruction, celui de la présomption d'innocence et des droits des victimes que la loi Guigou du 15 juin 2000 était venue renforcer ? Diverses incriminations contenues dans la loi de 1881 concourent à protéger la présomption d'innocence (image des personnes menottées, interdiction des sondages portant sur la culpabilité d'une personne mise en cause,...), tandis que d'autres tendent à assurer la sérénité et la qualité de la justice (interdiction de publication des actes de procédure, interdiction d'enregistrement des débats).
Justice et presse on chacun leur secret : " de l'enquête et de l'instruction " pour le juge et " des sources " pour les journalistes. Or, la recherche de la vérité passe par la connaissance, voire la divulgation des informations couvertes par le secret de l'autre. A la lumière des images récentes du déroulement d'une procédure américaine, qui a mis sur la scène médiatique, en véritable " live show ", l'arrestation du suspect jusqu'aux audiences devant le tribunal, et autres conférences de presse des avocats et procureurs, se pose la question du " statut " de l'image des personnes mises en cause, comme de celle des victimes.
Mais également, celle de l'adaptation de notre droit aux techniques nouvelles, comme à celle des critères de la Cour européenne des droits de l'homme. Telles est aussi la question que pose l'arrivée de Twitter dans les salles d'audience, ou à défaut de caméras, on dispose de comptes rendus d'audience " en direct ". Affaires Courjault, Raddad, d'Outreau... nombreux sont les grands dossiers criminels portés cette année à l'écran.
En prenant parfois certaines libertés avec les faits, ces adaptations invitent à s'interroger sur la limite entre fiction et réel, mais également sur le " droit à l'oubli ", le respect de la vie privée des intéressés comme de leurs proches. L'ensemble de ces questions, ainsi qu'un débat préliminaire sur le thème " Question prioritaire de constitutionnalité et droit des médias ", ont fait l'objet de débats au Forum Légipresse du 7 octobre 2011 dont ce numéro constituent les actes.